Le certificat d’apprentissage, une histoire de bon sens… pas toujours là!

Trop souvent, pensant bien faire, bon nombre d’entreprises formatrices délivrent à leurs apprentis, à la demande ou en fin de parcours formatif, des certificats de travail complets. Cette pratique est erronée. Elle ne respecte aucunement le cadre et le sens défini par le législateur. Le Code des Obligations fait clairement la distinction entre certificat de travail (art. 330a CO) et certificat d’apprentissage (art. 346a CO), documents différents tant au niveau de leurs intitulés, que de leurs modalités de rédaction (contenu) et d’émission.

Si la personne embauchée sous contrat de durée déterminée ou indéterminée peut demander en tout temps un certificat de travail complet (décrivant la nature et la durée des rapports de service, ainsi que la qualité du travail accompli et sa conduite au sein de l’entreprise) et qu’à sa demande expresse il peut être réduit dans son contenu, il n’en ira pas de même pour l’apprenti. Certes, il a le droit lui aussi d’obtenir un document attestant de son activité, mais dans son cas il s’agit expressément d’un certificat d’apprentissage qui doit porter obligatoirement ce titre pour éviter toute confusion de sens.

L’apprenti n’a pas besoin de le demander. Il le recevra automatiquement au terme de sa formation. Dans ce certificat, le formateur en entreprise doit se limiter à indiquer l’activité professionnelle acquise et la durée de la formation (art. 346a al. 1 CO). Ce n’est qu’à la demande expresse de l’apprenti ou de son représentant légal que l’employeur émet également une appréciation sur les aptitudes, le travail et la conduite de la personne en formation (art. 346a al. 2 CO), à l’exclusion de toute autre indication, notamment les résultats aux examens de fin d’apprentissage.

Comme on le voit, les règles de rédaction et d’émission ne vont pas dans le même sens. Elles sont inversées puisque l’apprenti reçoit systématiquement un certificat court et non pas un long comme un travailleur en poste.

Cette disposition est fondamentale. Elle permet à l’employeur de ne pas avoir à qualifier de fait les prestations de l’apprenant. Ce parti pris du législateur est très logique dans la mesure où l’apprenti a signé un contrat de formation et que c’est durant ce processus qu’il acquiert les compétences personnelles et professionnelles sur lesquelles doit se prononcer tout rédacteur d’un certificat de travail complet. On ne doit donc pas confondre un apprenti avec un employé autonome, déjà formé et engagé pour ses compétences / aptitudes. C’est une question de bon sens.

Lorsqu’à la demande expresse du travailleur en formation, l’employeur rédige un certificat d’apprentissage complet, il devra, conformément au principe de la bonne foi, tenir compte des circonstances particulières de la formation, notamment le jeune âge de la personne en formation et/ou son inexpérience. Il convient par conséquent d’être particulièrement bienveillant dans la formulation des appréciations. La tolérance doit être de mise.

Pour éviter les contre-sens et tenir compte de la difficulté toujours croissante que rencontrent les personnes fraîchement formées à s’insérer dans le monde du travail, rien n’empêche l’entreprise formatrice de remettre spontanément une lettre de recommandation visant à mettre en valeur la personne formée. Ainsi l’esprit de la loi est respecté et on va dans le bon sens.

À lire: Le certificat de travail en Suisse

Par Jean-Michel Bühler, Katja Haunreiter, Jean Lefébure
Editions LEP, 2016

Jalon de toute carrière professionnelle, le certificat de travail est parfois complexe à élaborer, car il doit refléter la réalité d’un parcours professionnel, parfois sinueux et inégal, tout en restant bienveillant.

Cet ouvrage apporte aux responsables des ressources humaines des clés et un appui pragmatique face aux difficultés que peut soulever l’établissement du certificat de travail, y compris en cas de réserves à l’égard d’un collaborateur.

Principales bases légales, doctrine et jurisprudence actuelles, nombreux exemples de formulations applicables à toutes situations en entreprises: un contenu utile autant aux responsables qu’aux travailleurs concernés.

Jean Lefébure, Formateur, consultant en GRH
lefebure@vtx.ch